Où il est question de se faire la belle, de se masturber sur Youporn, de fumer des pétards et de se laisser aller…
J’aurais tellement voulu être beau, être sûr de moi. J’aurais voulu séduire les femmes d’un seul regard, inspirer aux hommes le respect et la crainte. J’aurais voulu être une rock star, un acteur de cinéma, un mec à qui on ne la fait pas. J’aurais voulu m’asseoir sur le toit du monde et contempler d’en haut les agitations futiles de mes semblables.
Je passe mon temps, enfermé à double tour dans ma chambre d’adolescent, à écouter des musiques obscures ou à me masturber sur Youporn. Mes parents voudraient que je sorte de ma caverne, que je me coupe les cheveux et que je cherche un travail. Et moi, j’écoute en boucle un groupe que personne ne connaît, Something Anorak.
Ils ont tout compris, ces deux-là, à l’adolescent maladroit que j’étais, à ces heures perdues à regarder ma vie en spectateur, comme si c’était celle d’un autre. S’allonger, ne rien faire, fumer des pétards, se branler, et puis recommencer. Ad vitam aeternam. Jusqu’à ce que les murs de ma chambre commencent à s’effondrer.
Sur l’album Tiny Island, les Anglais cultivent une esthétique lo-fi de petit continent à la dérive, ne laissant à l’auditeur que deux alternatives : devenir le sujet du disque ou contempler du bord de la falaise le frêle et fuyant esquif.
Sans être inhospitalier, cet album n’est pas le genre de disque qui vient vous chercher facilement. Il exige que vous vous laissiez aller, que vous laissiez au vestiaire vos réticences pour vous plonger pleinement dans cet état de rêve éveillé. Si vous êtes prêt à y consentir, si vous n’avez pas peur ce que vous y trouverez – j’y croise régulièrement l’adolescent que j’étais – alors vous n’oublierez pas de sitôt votre séjour sur Tiny Island.