Avec I Forget Everything, le duo new-yorkais de pop expérimentale LEYA déploie son étrange singularité et fait naître un paradis bancal là où, normalement, rien ne devrait pousser.
Un paradis caché
Je cherchais le paradis et je me suis perdu. Le soleil ne brillait plus depuis longtemps. J’avais les pieds en sang, la gorge en feu, le cœur en cendres. Par les fenêtres, des visages hideux riaient sur mon passage. Chaque fois que je demandais mon chemin, leurs bouches édentées se fermaient dans un rictus.
Je trouvai un arbre décharné et m’y adossai, attendant que le sommeil vienne me prendre. Ma nuit se peupla de songes lugubres et de créatures effrayantes, jusqu’à ce que je sombre dans l’oubli.
J’étais en train de disparaître quand des notes de musique se frayèrent un chemin jusqu’à moi. Mon esprit se leva et se mit à marcher vers ces volutes sonores.
Nappes électroniques. Pincements d’une harpe désaccordée. Voix d’ange tombé du ciel.
Je m’approchai de la source, porté par une forme de ravissement, une épiphanie. Je ne distinguais rien. Tous les contours étaient flous, comme si des voiles superposés s’affairaient à me cacher la vérité. Moins je voyais, plus je ressentais. S’il se trouve un paradis sur terre, me dis-je, il ne peut exister qu’à l’abri des regards.
Les yeux clos, je pénétrai enfin dans ce paradis de brume (Eden of Haze) et j’oubliai tout, jusqu’à moi-même.
I Forget Everything de LEYA, un album qu’on n’oublie pas

Avec I Forget Everything, le duo new-yorkais LEYA offre une expérience immersive, à la fois troublante et fascinante. Atmosphère spectrale, sonorités fantomatiques qui semblent danser comme des esprits nocturnes.
Le chant mélancolique d’Adam Markiewicz louvoie autour de la harpe harpie de Marilu Donovan. On dirait que ces deux-là se cherchent, se touchent, s’égratignent, se rabibochent. On dirait que leurs chemins s’éloignent et se recoupent sans cesse. L’ambiance de l’album oscille entre détachement et beauté hypnotique.
Tout au long du disque, on marche sur un fil. Il suffirait d’un battement d’aile de papillon pour que tout se casse la gueule. On s’étonne presque que ça tienne. Mais c’est en marchant sur cette ligne de crête que LEYA déploie sa singularité. Certes, leur musique, à la croisée du folk médiéval, de la pop contemporaine et d’une forme de musique classique onirique, est exigeante. Mais le panorama en vaut la peine.
Sur I Forget Everything, LEYA poursuit son travail d’exploration sonore. La production est plus dépouillée et les expérimentations plus marquées que sur leurs enregistrements précédents. Voix insaisissables et mystérieuses, beauté glacée des arrangements, l’album séduit par sa capacité à troubler et à captiver. Par l’audace de ses choix artistiques, I Forget Everything confirme que LEYA est bien l’un des duos les plus singuliers de la scène expérimentale actuelle.
LEYA sera en concert en France :
- PARIS – La Station – Gare des Mines – le 27/05/2025
- LYON – SONIC – le 04/06/2025
- BORDEAUX – IBOAT – le 07/06/2025
- TOURS – TBA – le 08/06/2025