J’ai entendu : Alden Penner – Exegesis

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Où il est question de se barrer, de chercher la lumière, d’écrire son autoportrait et de garder une part d’insouciance…

Un matin comme tous les autres, je me suis regardé dans le miroir. Non, décidément, je n’étais pas l’homme que je rêvais d’être. Ces vêtements, cette coupe de cheveux, ce n’était pas moi. Sans m’en apercevoir, j’avais fini par ressembler à quelqu’un d’autre, quelqu’un que je ne connaissais pas. Ce regard usé, ces yeux délavés, je ne pouvais plus les voir, même en peinture. 

Alors, je suis parti. Je me suis barré, loin de mon reflet qui continuait à faire des grimaces derrière mon dos. J’avais besoin d’être libre, de faire mes propres expériences. J’ai suivi des routes à peine tracées, des chemins sinueux, des voies sans issue. J’ai marché jour et nuit. Parfois, d’autres âmes en errance faisaient un bout de chemin avec moi. Je ne savais pas où j’allais, ni où ni dans quel état je passerais la nuit. Mais ça n’avait pas d’importance.

J’ai cherché la lumière jusqu’au fond des caniveaux. A force de marcher, mes pieds se sont mis à saigner. Plus d’une fois, je me suis pris les pieds dans les ronces, j’ai roulé dans les orties. Quand je touchais le fond, il y avait toujours une main amie pour me relever et me montrer le soleil. Parfois, j’ai même cru que je réussirais à voler. Et puis me voilà, couché sur le papier, comme un autoportrait sur la toile. Le même homme, mais différent, avec toujours plus de questions à mes réponses.

Parce que, au fond, quoi qu’on dise, qu’on le fasse avec des pinceaux, des mots ou des notes de musique, c’est toujours son autoportrait qu’on écrit. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Alden Penner a intitulé son premier album solo ExegesisExegesis est un disque à la première personne du singulier, le premier à paraître sous son nom de famille et sans autre illustration qu’une photographie de l’artiste. Tout se passe comme si c’était lui-même que le musicien canadien soumettait ici à l’interprétation.

Exegesis, c’est en quelque sorte le résultat du cheminement personnel, spirituel et artistique d’Alden Penner depuis la fin de The Unicorns jusqu’à sa rencontre avec Laura Crapo, co-productrice de l’album. Une dizaine d’années au cours desquels Penner a d’abord fondé Clues puis The Hidden Words, exploré la foi baha’ie et continué à travailler sur les chansons, plus intimes, qui composent cet album. De ces expériences passées, le Canadien a su préserver la fraicheur, la soif d’expérimentation et la faculté à faire d’une chanson de deux à trois minutes un concentré d’émotion.

Exegesis offre une large palette du talent de son auteur, de la folk-song aérienne (I Icarus) au rock baroque le plus grandiose (Louis XIV). Penner fourmille d’idées, explore souvent plusieurs pistes dans un même titre, surprend, séduit, bouleverse, vous emmène exactement où il veut, sans jamais se répéter. Comme si le Alden trentenaire avait su garder en lui une part d’insouciance enfantine, un zeste de folie et de pureté originelle.

  

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