J’ai entendu : Dhafer Youssef – Birds Requiem

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La chose – appelez ça “révélation”, si vous voulez – s’est passée le dimanche 29 décembre sur une autoroute belge, quelque part entre Namur et Charleroi…

La pluie tombe à torrents. Les essuie-glaces de ma 307 vert pomme agitent frénétiquement leurs bras mécaniques, comme des danseuses au bord de la noyade. Je ne vois plus rien et je n’entends plus que le bruit de l’eau qui s’abat sur le pare-brise. Je m’accroche au volant comme un navigateur à la dérive à son gouvernail. A l’arrière, les enfants dorment, ignorants des péripéties du voyage.
Et soudain, venue de nulle part, il y a cette voix qui s’élève. Moi qui, d’habitude, ne crois jamais en rien, je sens une formidable vague de quiétude m’envahir. Peut-être est-ce ce que certains appellent Dieu. Une chose est sûre : s’il y a un Dieu, s’il existe, et s’il est parfait, alors je sais où il se trouve. Dans la musique de Dhafer Youssef.
En matière de Dieu, comme en matière de jazz, je n’y connais rien, je suis un profane, mais c’est sans importance. La musique de Dhafer Youssef n’est du jazz que si vous voulez qu’elle en soit. Elle est aussi bien plus que ça : un rite purificateur, un miracle, une émotion pure.
Je n’aurais jamais cru qu’une voix humaine soit capable de telles modulations. Si vous me l’aviez dit, je vous aurais traité de fou. Issu d’une longue lignée de muezzins (membre de la mosquée chargé de lancer l’appel à la prière), le vocaliste et oudiste tunisien Dhafer Youssef découvre très vite le potentiel de sa voix mutante qu’il utilise désormais comme un véritable instrument répondant aux autres musiciens.
C’est en Europe et, plus précisément, à Vienne qu’il ira ensuite parfaire sa formation musicale. Nourrie par le multiculturalisme viennois, sa musique offre un mélange inouï de profane et de sacré qui s’exprime pleinement sur Birds Requiem.

La genèse de cet album est, comme toutes les belles histoires, une histoire de rencontres. Une histoire qui s’écrit entre la Turquie et la Scandinavie puisque Dhafer Youssef a réuni, autour de ce disque, le trompettiste norvégien Nils-Peter Molvaer et les musiciens turcs Hüsnü Senlendirici et Aytac Dogan.

Tu t’es déjà déplacé à dos de nuage, ami lecteur ? Non ? Alors écoute ce disque. Birds Requiem est à la fois planant et profond, mélancolique et chaleureux, dépouillé et habité. Il y avait bien longtemps que la musique ne m’avait pas procuré des émotions aussi intenses. Si tu aimes la musique, si tu chéris la liberté, alors ce disque est aussi pour toi…

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