J’ai entendu : Dirty Beaches – Badlands

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 Une guitare à bout de souffle s’époumone à répéter un riff plaintif et lancinant. Un train en partance pour nulle part s’avance à travers le brouillard. Une voix déchirée, intemporelle, s’élève et se fracasse contre les vagues sonores déchaînées et inexorables. Écouter la musique de Dirty Beaches, c’est vivre une expérience poétique et hallucinante. Une plongée torturée dans les méandres névrotiques de l’esprit d’Alex Zhang Hungtai, globe-trotter énigmatique, né à Taïwan et désormais installé au Canada. L’impression dégagée par l’album Badlands est celle d’un road-movie délirant dans lequel on croiserait un une galerie de portraits plus inquiétants les uns que les autres. D’ailleurs, Alex Zhang Hungtai ne cache pas sa fascination pour les films de David Lynch, qu’il revendique comme l’une de ses sources d’inspiration.
Reconnaissons-le, l’univers de Dirty Beaches n’est pas des plus accessibles. Torturé, tortueux, érudit, hypnotique, Badlands peut de prime abord procurer une sensation de malaise à l’auditeur non averti. C’est un disque qui est du début à la fin à la limite de la rupture. Sur fond de boucles sonores échevelées, Alex Zhang Hungtai livre sa propre version fantasmée du rock des années 50. Il présente d’ailleurs ce disque comme un hommage à la musique qu’écoutait son père. Mais si sa voix de crooner, écorché vif, nous ramène sans peine au rock de papa, les ambiances sonores relèvent davantage d’un délire psychotique et expérimental. La référence à la filmographie lynchienne n’est pas galvaudée. J’ai rarement entendu un disque qui me plonge à ce point dans un univers cinématographique. Alex Zhang Hungtai définit ses compositions comme la bande-son d’un film qui n’existe pas. Il part des images qu’il a en tête puis les retranscrit en musique pour créer ces atmosphères fantasmagoriques. Ses chansons parlent du voyage, de la fuite, de l’exil. Une invitation au rêve. Un billet simple pour un train-fantôme. 
La musique de Dirty Beaches est le reflet brumeux de la personnalité d’Alex Zhang Hungtai. Une œuvre éminemment autobiographique qui assume néanmoins sa part d’ombre comme semble en témoigner la pochette, qui donne à voir le visage de l’artiste partiellement caché derrière un halo de fumée. C’est la porte d’entrée vers un univers hallucinant et singulier. Une musique apparemment minimaliste mais qui, pour qui sait bien tendre l’oreille, recèle des trésors insoupçonnés. A bon entendeur…
A noter : Dirty Beaches sera en concert à Strasbourg, le 31 novembre (19h), à la Galerie Stimultania. Moi, j’y serai…Et vous, où serez-vous?

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