Le groupe que les autres écouteront dans un an – Ep.5 : Oh! Tiger Mountain

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Matthieu s’emmerde à Salon de Provence. Pour tuer le temps, il fume des clopes, picole le soir avec ses potes, grattouille sa guitare et pousse la chansonnette. Au hasard d’une interview, on apprend qu’il est allé en Angleterre, chanter dans les pubs. Il en a gardé une solide capacité à chanter bourré dans la langue de Shakespeare. De lui, on ne sait pas grand-chose de plus si ce n’est ce que veut bien laisser filtrer l’autobiographie cosmique qu’il livre sur son profil Facebook. Un brin de folie, l’obsession lancinante d’une Amérique fantasmée et puis, ce nom étrange, Oh! Tiger Mountain, puisé dans une chanson de Brian Eno.
Oh! Tiger Mountain, c’est avant tout une voix. Une voix chaude, teintée d’émotion, une voix de crooner qui sent bon l’alcool fort et le tabac. Une voix, qui plus est, sûre de sa puissance, qui s’autorise des silences éloquents, des envolées plaintives ou des vocalises caressantes. Les compositions classieusement minimalistes prennent tout leur sens grâce à l’intensité de l’interprétation. Fermez les yeux et, avec trois fois rien, Oh! Tiger Mountain vous emmène sous d’autres cieux, dans son Amérique à lui. Avec son album Sings Suzie, il livre une véritable leçon de folk épuré, fait à la maison, et, finalement, bien plus riche et complexe qu’il n’y paraît. Car, sous un minimalisme de façade, les arrangements se révèlent finement ciselés. On passe allègrement de géniales expérimentations pop (Little Red Cells) à des ballades plus mélancoliques sans jamais baisser de pied.
Artiste atypique sur la scène française, Oh! Tiger Mountain se distingue par une volonté d’indépendance ouvertement affichée. En témoigne le choix des formats choisis – l’album est diffusé uniquement en téléchargement ou en vinyle – mais aussi le fait que Matthieu ait créé sa propre maison de disques, Microphone Recordings, pour promouvoir la scène indé marseillaise. En tout cas, en ce qui me concerne, j’ai retrouvé dans ce disque ce côté artisanal de la musique folk, qui fait défaut aux soi-disant porte-bannières du style. J’avais déjà eu l’occasion d’évoquer ici le britannique Keaton Henson. D’une certaine manière, Oh! Tiger Mountain peut être considéré comme son cousin français. Ils partagent en tout cas une même intégrité artistique et un même goût pour les ambiances intimistes. Ce folk-là a un bel avenir devant lui tant son potentiel de séduction est immense. A écouter d’urgence et sans modération…

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