J’ai entendu : Extra Life – Dream Seeds

Browse By

J’ai beau fermer les yeux, essayer de me concentrer, impossible de me souvenir de mes rêves. Rien, pas la moindre bribe. Le désert complet. Où, dans quelles contrées, mon esprit vagabonde-t-il lorsque se ferment les portes de ma conscience? Je n’en ai pas la moindre idée. Qui et où suis-je entre l’instant où je m’endors et celui où j’ouvre à nouveau les yeux? Quel est donc ce mystère? La simple évocation de ce vaste territoire inconquis m’obsède et m’interroge. Peut-être est-ce la raison pour laquelle, au lieu d’être artiste, je ne suis qu’un simple évangéliste de la culture. Les critiques sont des artistes ratés. Mais qu’est-ce qui, au fond, fait un véritable artiste? Ne serait-ce pas la capacité à transposer les rêves en mots, en images ou en musique? Ou bien est-ce ma propre obsession que je généralise? Pourtant, tout ce que je lis, regarde ou écoute en ce moment tourne autour de cette activité nocturne. 1Q84, Awake, Twin Peaks. Autant d’œuvres qui font de l’onirisme un élément central. Cette collision entre rêve et réalité est aussi au cœur du concept de Dream Seeds, troisième album du groupe Extra Life.
Ce n’est que tardivement et grâce à l’excellent blog ami Little Reviews que j’ai découvert ce groupe originaire de Brooklyn. Après deux albums au son rugueux et torturé – mélange détonnant de musique expérimentale, de rock progressif, d’éléments classiques et médiévaux, de secousses rythmiques hallucinantes – qui leur avaient valu une solide réputation dans les cercles underground, Extra Life revient ici avec un album un brin plus accessible pour les oreilles chastes, qui devrait leur permettre de passer, en fin d’année, des Strangest Of aux sempiternels Best Of. Que les fans de la première heure se rassurent, le trio emmené par le génial et visiblement barré Charlie Looker ne s’est pas du jour au lendemain métamorphosé en une inoffensive chorale de petits chanteurs à la croix de bois. Il se trouve simplement qu’entre-temps, le groupe a perdu son bassiste et a dû se redéployer dans une configuration nouvelle. Looker se concentre à présent sur les claviers et le chant. Les deux autres côtés du triangle s’acquittent des autres instruments. Caley Monahon-Ward assure les parties de violon, la guitare électrique, un peu de synthé et les bidouillages électro. Nick Podgurski, quant à lui, est à la batterie. Comparé aux deux premiers albums sur lesquels, je dois bien l’avouer, je peine à m’enthousiasmer, Dream Seeds fait montre d’une énergie mieux canalisée. Si la ballade inaugurale No Dreams Tonight, et son solo de flûtiau, témoignent d’une volonté d’apaisement, Dream Seeds comporte aussi son lot de morceaux tendus et nerveux. Une dualité qui s’explique par la double thématique du disque. Concept-album sur les rêves, les cauchemars et les peurs liées à l’enfance, exploration du subconscient à la recherche d’innocence, de moralité, en quête de sens, Dream Seeds est une œuvre complexe et polymorphe qui, dès la première écoute, vous hante et vous embarque. Difficile de rester insensible à ces rythmiques complexes et puissantes, à ces nappes de guitares et de synthés géniales et envoûtantes, surplombées par la voix charismatique de Charlie Looker, mélange de prêcheur halluciné et de Morrissey déjanté. C’est à découvrir de toute urgence ci-dessous, si vous ne voulez pas mourir idiot et, comme d’hab, si vous aimez, achetez le disque et allez les voir en concert s’ils passent près de chez vous…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Afficher les boutons
Cachez les boutons