La Coupe du Monde en 32 groupes : Guadalupe Plata (Espagne)

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Où il est question de trains qui déraillent, de muletas qui rendent chèvre, de boxeurs chancelants et de chiens errants…

Ce que j’aime dans le football, c’est son côté imprévisible. Tout à coup, un événement inattendu vient bousculer les certitudes. Il suffit de presque rien – un instant de folie, une étincelle de génie, une décision arbitrale controversée – et, sans trop qu’on sache pourquoi, les trains qui arrivaient toujours à l’heure se mettent à dérailler. 
Regardez les Espagnols : onze muletas qui s’agitent, jusqu’à rendre chèvres les taureaux adverses. Attrape-moi si tu peux. Pendant six ans, personne n’a pu. On courait beaucoup, on s’époumonait et, après 90 minutes, le visage cramoisi et les oreilles fumantes, on avait presque oublié à quoi ressemble un ballon. Et puis, hier…
Les maillots rouges quittent la pelouse, tête basse, boxeurs chancelants après un deuxième round chaotique. Ils se refont le film à l’envers, ne comprennent pas ce qui leur arrive. C’est quoi, ce goût amer ? C’est donc ça, perdre ? Rois défaits, à genoux, ils demandent pardon à leur peuple éploré. 
Honneur aux vaincus. L’Espagne a mordu la poussière après un règne sans partage. L’Espagne a le blues. Mais l’Espagne a Guadalupe Plata, un trio qui porte le nom de la vierge protectrice de son village, sans doute pour mieux exorciser le démon qui habite sa musique. Parce que si la Roja s’est montrée particulièrement apathique, ces trois-là, en revanche, ont le diable chevillé au corps. 
La musique de Guadalupe Plata, c’est l’essence même du blues, le combat permanent du mal contre le bien, c’est un couteau qu’on remue dans une plaie béante, une complainte qui s’écrit dans le feu et dans l’inconfort. Ecoutez la guitare gémir comme un chien errant, écoutez la voix enragée du chanteur. Guadalupe Plata est un groupe qui s’inscrit dans une histoire mais qui sait aussi en détourner les codes pour tracer son propre sillon, en “en-flamencoïsant” le blues ou en le poussant, sans souci du qu’en-dira-t-on, dans ses derniers retranchements psychédéliques. E viva España.

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