Mes vinyles qui craquent – Ep.6 : Nancy Sinatra & Lee Hazlewood – Nancy & Lee

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Passé un certain âge – à vrai dire, à l’approche de la trentaine – le besoin, pour les hommes, de s’entourer de femmes plus jeunes, commence à se faire sentir. Quel intérêt, en effet, de s’acoquiner avec une beauté en passe de se faner? Rien de plus stimulant pour l’homme fatigué que de se replonger corps et âme dans la pleine fleur de l’âge. Retrouver la fraicheur de ses vertes années. Retrouver ces années folles où tout semblait encore possible, où la vie n’avait pas encore bouffé tous ses beaux rêves d’avenir. L’homme est nostalgique d’un passé révolu. Il passe sa vie à nager à contre-courant, à se battre contre l’usure du temps et contre ses propres erreurs. La femme, en revanche, a le regard tourné vers le futur. De l’océan déchaîné des possibles, elle navigue vers une mer calme et paisible. A la croisée des chemins, il n’est pas rare que le vieil ours mal léché et la femme-enfant se rejoignent et se maintiennent en équilibre entre les précipices de la vie. L’un a besoin d’ivresse et de folie et l’autre de tempérance et de sûreté. On les aperçoit, bras dessus bras dessous, chacun la béquille sur laquelle l’autre compense ses pesanteurs. J’avais prévu de parler d’Adam Green & Binki Shapiro, dont le premier album en commun sortira en janvier 2013. Ils se sont rencontrés alors qu’ils sortaient chacun d’une rupture sentimentale. Ils se consolent musicalement. Épaules sonores compatissantes. Et puis, en remontant un peu à la recherche de précurseurs, le duo Nancy Sinatra & Lee Hazlewood est vite apparu comme un point de référence évident. 

En 1968, l’histoire d’amour entre Gainsbourg et Bardot prend fin. Je t’aime, moi non plus. Détruit, déprimé, quasi suicidaire, Serge fait alors la rencontre de Jane Birkin et embarque avec elle pour une année érotique. De l’autre côté de l’Atlantique, un autre duo s’apprête à défrayer la chronique. Auteur-compositeur de génie mais peu connu du grand public, Lee Hazlewood est vite catalogué comme has been au moment de la Beatlemania déferlante. Il doit son salut à Frank Sinatra qui cherche à reprendre la main sur la carrière de sa fille, Nancy. Appelé à la rescousse, Hazlewood écrit These Boots are made for Walking et la gamine égarée devient l’icône mondiale de la femme libre et indépendante. Succès planétaire qui affole les charts tout comme Something Stupid que Nancy interprète avec son père. C’est le début d’une fructueuse collaboration entre le redneck bourru et le clan Sinatra. Flairant le bon coup, Hazlewood a l’idée du duo garçon-fille. Nancy auditionne plusieurs chanteurs mais, le seul avec qui ça fonctionne vraiment, c’est Lee. Il sera le cowboy rustaud, à la voix grave et profonde; elle, la lolita gracile et sensuelle. De cette collaboration naîtront deux albums dont celui-ci, Nancy & Lee, petit trésor de pop des années 60. Le vieux loup de mer peut bien rire derrière sa moustache. Il trouve enfin gloire, fortune et reconnaissance. Et aussi quelques emmerdes puisque la presse people insinuera que Lee et sa protégée ne font pas que jouer au scrabble le soir venu. Petite histoire mais restent les chansons. De petites perles enfilées les unes aux autres, magnifiquement ciselées et arrangées. Du sur-mesure pour la voix candide de Nancy. En un mot, un chef-d’œuvre.

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