En français dans le texte : Les Wayfarers

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Où l’on apprend que les Wayfarers ne sont pas que des lunettes de soleil mais aussi un excellent groupe nancéien.

Toc toc toc… Madame Soleil ? Où êtes-vous ? Je ne voudrais pas vous déranger mais quand même, on se gèle les branches ici. Darde tes rayons, ça fait longtemps qu’on les a pas vus. Des mois entiers qu’on prend la poussière au fond d’un vieux tiroir, entre prospectus usagés et crème solaire asséchée. Une éternité qu’on a pas vu le bout d’un nez. Nous, les Wayfarers, au rebut comme de vulgaires lunettes en métal. C’en est trop. Passez moi la chamoisine. J’en ai la larme au coin du verre. Oser nous faire ça à nous ! Dire que grand-mère appartenait à Bob Dylan. Quand je pense à toutes ces petites pimbêches qui se pavanent au nez d’Antoine sur des îles paradisiaques, ça me donne envie de sauter par terre et de me laisser piétiner. Antoine, non mais ! Les cheveux longs, les idées courtes. Et dire que Papy a passé toute sa vie sur le nez de Ray Charles. C’est quand même autre chose, avouez. C’est pas qu’on soit jalouses, non. On aimerait juste voir le monde, voyager à dos de nez, entendre la douce musique de l’extérieur, respirer un bon coup, au lieu de croupir dans ce tiroir qui sent le renfermé. Aidez-nous, Madame Soleil. Inventez-nous un avenir.

Croyez-le ou pas, mais c’est ainsi, par la grâce de cette intervention solaire, que des paires de lunettes en pleine crise existentielle se muèrent du jour au lendemain en un jeune et fringant groupe de rock’n’roll. Les Wayfarers étaient (re)nés mais surtout Edouard, Geoffrey, Romain, Thibaut et Julien, un quintette bien disposé à nous en mettre plein la vue.

A première vue, si je cherchais un endroit pour réinventer le bon vieux temps du rock’n’roll, ce n’est pas Nancy que j’aurais pointé sur une mappemonde mais, avec un pied en Lorraine et l’autre dans le Tennessee, les Wayfarers réalisent le grand écart parfait. Une position dans laquelle il n’est d’ailleurs pas exclu que vous vous retrouviez à l’issue d’un de leurs concerts. Quand la guitare papillonne et s’enroule autour de la contrebasse, quand le saxophone souffle le chaud mais jamais le froid, quand la rythmique fait dodeliner les têtes et taper les pieds, les corps et les cœurs transpirent, s’emballent, s’embrasent. Une débauche d’énergie salutaire et vivifiante qui laisse aussi la part belle aux textes.

Les Wayfarers ont un sens aigu de la narration. Leurs chansons s’écoutent comme de petites histoires. Chambre 607 sonne comme un mini-polar à l’écriture quasi-cinématographique. Le décor est planté, les images s’insinuent et se fraient un chemin dans les esprits. Témoins privilégiés de la scène qui nous est projetée, spectateurs en même temps qu’auditeurs, nous goûtons à nouveau à ce plaisir enfantin de s’entendre raconter des histoires. Corps en mouvement, imagination stimulée, la musique des nancéiens devrait être déclarée d’utilité publique. Les Wayfarers, c’est sûr, méritent amplement de se faire une place au soleil.

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