Où il est question d’un jour d’avril pareil à un soir d’automne, de grêlons gros comme mon poing, de se tenir au milieu du déluge et d’épouser le chaos…

Chère Daisy, je me souviens du jour où vous m’êtes apparue. C’était un jour d’avril pareil à un soir d’automne. Il pleuvait comme on pleut quand on est triste. J’étais là, à regarder mes pieds, comme un amoureux transi à qui on aurait posé un lapin, quand vous avez débarqué dans ma vie.

A genoux, à bout de souffle, j’avais besoin de m’évader de cette réalité merdique. Si j’avais été toxico, je me serais fait un fix. Mais, ma came, à moi, c’est la musique. Sans elle, j’aurais pété les plombs depuis longtemps. Il me fallait une dose, vite, c’est ce que je me suis dit, et puis, sans trop que je sache comment, l’instant d’après, vous êtes arrivée.

Le vent faisait tomber les feuilles, renversait les poubelles. Des grêlons, gros comme mon poing, fracassaient les pare-brises des voitures. Et vous, vous vous teniez au milieu du déluge, auréolée de lumière, un léger sourire aux lèvres. J’ai tout de suite su que vous étiez venue pour me sauver.

Les éléments déchaînés, on sent bien que c’est pas ça qui vous arrête. La terre pourrait se mettre à trembler, il pourrait tomber des pierres que vous continueriez à chanter. Que votre voix épouse le chaos ou le surplombe, c’est toujours vous qui faites la pluie ou le beau temps.

Votre premier EP en solo, Heart Full of Beef, sorti il y a quelques semaines, n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Déjà, la blogosphère s’agite, soubresaute. Au jeu des comparaisons, on vous donne du Anna Calvi, du PJ Harvey, du Kate Bush. Et, en effet, tout y est : l’énergie, les guitares discordantes, la théâtralité. Sur fond de riffs chaotiques, vous murmurez ou vous vous époumonez avec la même conviction, en mettant toujours autant de cœur (full of beef) à l’ouvrage. Vous caressez ou empoignez avec la même fougue.

Dompteuse, prêtresse, hypnotiseuse, vous occupez l’espace sonore comme une actrice occupe une scène de théâtre. Vous naviguez d’une extrême à l’autre entre douceur et destruction. En quelques instants, le calme fait place à la tempête, le volcan entre en éruption. L’intensité de votre interprétation ne laissera personne indifférent. Que vous vous exprimiez dans un fracas de guitares et de percussions ou sur des instrumentations plus sombres et mélancoliques (je suis devenu accro à Cloth), vous ne faites pas dans la demi-mesure. On vous adorera ou on vous détestera. J’ai déjà choisi mon camp.