Hopla Geiss – Ep.6 : Herzfeld Orchestra

Browse By

Ce weekend, deux événements footballistiques consécutifs et possiblement corrélés se sont produits, faisant tellement de bruit que, sauf si vous vivez sur une autre planète, vous ne pouvez pas ne pas en avoir entendu parler. Vendredi, notre équipe nationale de balle au pied a enfin remporté une victoire en compétition internationale après six années de disette et un violent orage. Le lendemain matin, nouveau coup de tonnerre sur le ballon rond hexagonal, Thierry Roland a définitivement rendu l’antenne. « Après ça, on peut mourir heureux », avait-il déclaré à l’issue de la Coupe du Monde 1998. Il aura pris son temps. Alors, faut-il se joindre au concert de louanges qui ont accompagné sa disparition? D’un côté, Thierry Roland, c’est un peu notre madeleine de Proust à tous. Des souvenirs de matchs de foot en famille, entre amis, entre collègues, dans le salon, en internat, au camping, en vacances, au travail, commentés par Thierry et son compère de (presque) toujours Jean-Mimi, nous en avons tous plein la tête. En même temps, il faut bien reconnaître que le bonhomme représentait dans toute sa splendeur la beaufitude franchouillarde la plus crasse et tout ce qu’elle entraîne de chauvinisme, de machisme, de mauvaise foi et d’intolérance. Une sorte de miroir du gogo moyen qui regarde les matchs une bière à la main, le ventre sortant du T-shirt et la main dans le calbute, en engueulant bobonne parce que la pizza n’arrive pas assez vite et en estimant que, si la France a perdu, c’est sans doute parce qu’il y avait trop de joueurs noirs dans l’équipe. Alors qu’aurait-il pensé du Herzfeld Orchestra? Aurait-il vanté l’esprit collectif d’une formation qui réunit tous les talents disponibles d’une écurie pour atteindre les sommets? Ou, au contraire, aurait-il vilipendé cette chorale « d’allemands » qui chantent en anglais?
Sacrée aventure collective en tout cas que le Herzfeld Orchestra. On a déjà vu des collaborations croisées au sein d’un label mais, à ma connaissance, il n’y a guère d’autres exemples de super-groupe auquel tous les musiciens d’un label sont conviés à participer. Démarré en 2004, le projet, avant tout scénique, consistait à la base à ouvrir de nouvelles perspectives aux compositions respectives des différents groupes participants. Ce n’est que plus tard qu’est née l’idée d’un répertoire propre au Herzfeld Orchestra. Enrichi de nouveaux membres, le groupe a peu à peu élargi ses horizons et a sorti en 2010 un premier album très remarqué. Plus récemment, les musiciens du label strasbourgeois Herzfeld ont décidé de remettre le couvert, de s’enfermer à nouveau tous ensemble en studio et d’accoucher d’un nouveau disque aux orientations nettement différentes. Autant le premier album éponyme était clairement à ranger du côté du folk acoustique, autant Midlife Poncho démontre la capacité du collectif à s’aventurer avec succès sur des terrains différents, plus électroniques. Loin de répéter les bonnes recettes de son prédécesseur, ce nouvel essai concluant témoigne d’une volonté de ne surtout pas tourner en rond, marquée notamment par l’addition tout à fait pertinente d’un chœur féminin. Les 12 titres électro-folk qui le composent sont certainement ce qui fait de mieux en France dans ce style musical. Tout à la fois colorées, luxuriantes, réconfortantes, apaisantes mais aussi aventureuses, alambiquées et expérimentales, les compositions du Herzfeld Orchestra plongent l’auditeur dans un état de grâce prolongé. Il s’en dégage, en dépit du nombre de participants, une étonnante cohérence, une rare perfection, comme une sorte de pied-de-nez à l’individualisme ambiant et une nouvelle preuve que l’excellence est dans la partage et la collaboration. De la première à la dernière note, la magie opère, la pop rayonnante et lumineuse du Herzfeld Orchestra vous prend aux tripes et vous maintient en lévitation. Pas de doute, il s’agit là d’un très grand disque et, à coup sûr, de l’une des aventures humaines et musicales les plus intéressantes du moment. Écoute intégrale ci-dessous mais, comme d’hab, ça ne vous dispense pas de l’acheter!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Afficher les boutons
Cachez les boutons