J’ai entendu : THEESatisfaction – awE naturalE

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Discothèque Machin-Chouette, le 31 décembre 20XX, à 23h27.
– Mec…
– …
– Hé MEC !!!!
– Putain, tu fais chier… Tu vois pas que je suis en train de mixer, là ?
– Euh ouais, désolé de t’interrompre, mais, perso, Patrick Juvet, c’est pas trop mon kiff… Franchement, un ahuri qui cherche les femmes depuis 35 ans sans jamais les trouver, ça m’inspire pas confiance. Tu pourrais pas nous passer quelque chose d’un peu plus sophistiqué?
– Sophie qui ?
– SOPHISTIQUE !!!
– Ah ouais, la grande blonde avec les seins qui pointent. Elle est trop bonne. Tu la connais ?
– Non, non, je disais… Pour la musique, si tu pouvais arrêter de passer des zics de télétubbies et nous mettre un truc plus intelligent…
– Je fais danser les gens, connard. C’est pour ça qu’on me paye. Et si t’es pas satisfait, tu peux toujours aller te faire enculer.
– Merci, je vais passer mon tour. Mais niveau satisfaction, sur une échelle de 1 à 10, je dirais que je frôle le zéro. Alors, maintenant, tu vas arrêter ta musique de minable et, à la place, tu vas mettre ça…
A chaque fois, c’est pareil. Même en rêve, je me fais choper par le videur avant d’avoir pu convaincre le DJ de passer THEESatisfaction. Ça me débecte. Si je ne vais en boîte que contraint et forcé ou après m’être envoyé tout le rayon alcools forts de la Coopé, c’est que, certes, je ne suis pas John Travolta (en tout cas, pas celui de La Fièvre du Samedi Soir) mais c’est aussi parce que, pour la plupart, les DJs sont décolorés, arrogants, stupides et ne connaissent rien de rien à la vraie musique. Trouvez m’en un qui fasse bouger les gens avec un morceau de THEESatisfaction et vous me verrez repeupler illico les dancefloors avec mon mojo. Je sais, j’ai souvent dit que je n’aimais pas le rap mais il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas de chemise. Ce soir, si je m’écoutais, je me parerais de mes plus beaux oripeaux pour aller transpirer sur les géniales élucubrations de Stasia Irons et Catherine Harris-White. A-t-on jamais entendu plus belle fusion de ce que la musique “black” a offert au monde au fil des époques ? Le duo révèle une culture musicale très étendue, incluant aussi bien rap, soul et jazz. Couple à la ville comme à la scène, Cat et Stas fondent THEESatisfaction en 2008. Adeptes des scènes ouvertes et profitant du bouillonnement artistique de Seattle, elles sont vite repérées par Ishmael Butler de Shabazz Palaces qui les invitent à participer à l’enregistrement de l’album Black Up en 2011. Signées à leur tour sur le label Sub Pop, celui-là même qui, en son temps, avait signé Nirvana, les deux filles sortent awE naturalE en mars 2012. N’ayons pas peur des superlatifs. C’est le début d’une nouvelle ère dans la culture musicale. L’union fantasmée de Sun Ra et A Tribe Called Quest, la synthèse aboutie d’un demi-siècle d’histoire et le tout sous un angle ludique et désinhibé. Elles se définissent elles-mêmes comme “les reines de l’âge enfumé, les impératrices du temps, une dynastie pré-égyptienne”. Et, en effet, elles sont tout ça à la fois. Tout ça et bien plus encore.

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