J’ai interviewé : Lauter

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La musique, Boris Kohlmayer, alias Lauter, est tombé dedans quand il était petit. Avec son folk psychédélique aux ambiances envoûtantes, (cf Hopla Geiss – Ep.3) l’Alsacien, originaire de Lauterbourg, construit album après album l’un des univers les plus captivants de la scène hexagonale. Avec lui, nous sommes revenus sur son amour de la musique, son univers, ses projets…

Comment es-tu tombé dans la musique?

J’ai eu la chance de grandir dans une famille de mélomanes. En fait, j’ai l’impression qu’il y a eu et qu’il y a encore de la musique en continu chez mes parents. Que ça soit la radio, genre France Musique, ou des disques de musique classique. Ma grande soeur écoutait des disques rocks, plutôt 70’s, dans sa chambre. On avait un piano, une guitare, des flûtes et des harmonicas… J’ai pris mes premières leçons de piano dès la maternelle. Ça a évolué de la musique classique au jazz jusqu’au lycée, où je me suis mis à la guitare électrique. J’y ai joué dans un premier groupe de reprises de standards du rock. Plus tard, j’ai passé quelques mois en fac de musique où j’ai découvert la musique et l’improvisation contemporaine, puis je suis entré au conservatoire de jazz de Strasbourg. J’ai participé à de nombreuses formations d’improvisations mêlant rock, électroacoustique, jazz, noise… Tout cela c’est “stabilisé” au sein du trio puis quartette Drey. L’envie d’écrire des chansons et de créer un son plus personnel m’a mené à Lauter.

Herzfeld, ça m’a l’air d’une sacrée aventure collective. Est-ce que tu peux nous en dire plus sur le mode de fonctionnement un peu particulier du label?
Oui, c’est une aventure collective. Avec Drey, nous avions sorti notre premier EP sur le label Antimatière. Il y avait alors également à Strasbourg le label Vergo records (T, Spide, Renz). Nous nous cotoyions de plus en plus et nous nous appréciions. Nos goûts musicaux, nos esthétiques. Et l’envie de faire quelque chose ensemble s’est vite fait ressentir. Nous avons décidé d’unir nos forces, nos expériences de manière collégiale en créant Herzfeld qui, dans un premier temps, a sorti les albums des groupes fondateurs. Le label a ensuite naturellement élargi son champ musical, tout en cultivant l’esprit familial qui peut s’observer aujourd’hui encore au sein du Herzfeld Orchestra, par exemple. 

Outre tes aventures plus ou moins solitaires avec Lauter, tu contribues également à Little Red Lauter et au Herzfeld Orchestra. Que t’apportent ces collaborations?
Il y a d’abord le plaisir de faire de la musique, de partager quelque chose, de créer un son. Je suis friand de nouvelles expériences et composer pour des textes ou arranger des chansons sont des pratiques que j’affectionne particulièrement. C’est un peu comme faire la cuisine : si c’est pour soi-même, on ne se pose pas forcément de questions, on fait sa popotte. Quand c’est pour quelqu’un d’autre, il faut que ça soit bon, on veut que l’autre apprécie, en redemande, dise mmmh… qu’est ce que tu as mis dedans, quelle est cette épice?

Ta musique est un savant mélange de folk et de psychédélisme. Quels sont les artistes qui t’inspirent le plus?
C’est une question difficile. J’aime beaucoup de musiques ou, en tous cas, je trouve mon compte dans beaucoup de styles. Je voudrais que ma musique en soit le reflet. J’écoute encore Neil Young, AC/DC, les Doors, les Beatles, Joy Division, Nick Drake, les Beach Boys… de grands classiques qui ont marqué mon adolescence. 

Il se dégage de ta musique une atmosphère étrange et onirique, voire à certains moments déstabilisante ou inquiétante. Est-ce une volonté de ta part de sortir l’auditeur de sa zone de confort?
Je crois que j’essaie tout d’abord de faire une musique qui me ressemble ou que j’ai envie d’écouter. Selon mon humeur les ambiances peuvent être sombres ou plus enjouées… Je ne sais pas si je me soucie de l’auditeur en les créant. Si ces musiques sont écoutées et si effectivement elles déstabilisent, tant mieux !

J’ai lu quelque part que A Walk Will Take My Mind Off Things retraçait des souvenirs d’enfance et avait été écrit assez rapidement. Par contre, la gestation de The Age of Reason a été plus compliquée mais le résultat est peut-être encore plus complexe et plus abouti. Où es tu allé chercher l’inspiration pour réaliser ce double album?
A Walk Will Take My Mind Off Things a été composé en gros en deux semaines en plus de matériaux que j’avais déjà sans savoir que c’était pour ce projet. En deux semaines parce que c’est le temps qu’il a fallu pour répéter pour faire un premier concert. La plupart des chansons ont donc été jouées live bien avant l’enregistrement. Pour le suivant, oui, ça a mis plus de temps. Peut-être parce que la démarche était inverse… J’ai fait beaucoup de maquettes qui partaient dans différentes directions, sans trouver de lien fédérateur. Ce lien devait tout simplement être les textes, la voix et la guitare… et le fait qu’en fin de compte l’album soit un double, ce qui permettait peut-être cette plus grande liberté dans la composition. 
Où chercher l’inspiration? Dans les lectures, la musique des autres, les films, les voyages, les expériences personnelles… Ma pratique de la musique au quotidien est essentiellement basée sur la composition, faire des maquettes abouties ou non. J’accumule jusqu’à ce que je sois enfin satisfait.

Que ce soit sur A Walk Will Take My Mind Off Things ou sur The Age of Reason, on retrouve la forêt comme univers visuel commun. Faut-il y voir une signification particulière? 
La forêt, parce que je j’ai besoin de ce rapport à la nature. J’ai grandi à la campagne et je garde en tête une sorte de mythologie que nous avions peut-être inventée avec mes amis d’enfance à Lauterbourg.
Et le costume d’ours sur la pochette de A Walk Will Take My Mind Off Things, d’où est venue l’idée? 
Je ne voulais pas qu’on voit mon visage et je crois que ça allait bien avec mon caractère et le fait que, comme un ours, je passe beaucoup de temps dans ma grotte. 

Tu as récemment collaboré avec un dessinateur sur une série de concerts. Comment vous êtes vous trouvés et comment ça se passe concrètement?

Ce spectacle a été créé en coproduction avec le CREA-Festival Illiko de Kingersheim et le Festival BD Aix. La première a donc eu lieu à Aix-en-Provence en 2009. Vincent Vanoli, le dessinateur, et moi sommes sur scène. Pendant une heure environ, Vincent créée une bande dessinée en direct, projetée sur un grand écran, et moi, à chaque séquence, je joue une nouvelle chanson. Nos univers respectifs se marient bien : ici, nous développons des histoires et des ambiances qui se déroulent le plus souvent dans des paysages ruraux qui nous sont chers. Les tableaux en noirs et blancs s’allient à la sobriété du guitare/voix tout en gardant le côté pop (Vincent est un amateur pointu de ces musiques). Depuis 2009, et comme nous nous entendons bien, nous avons eu le plaisir de jouer ce spectacle une quinzaine de fois.

Tu vis maintenant à Paris depuis quelques années. Y a-t-il plus d’opportunités pour un musicien qu’en Alsace?

Oui, mais étrangement je n’ai pas encore eu l’opportunité de jouer à l’Olympia ou dans d’autres salles mythiques… Je continue à beaucoup jouer en Alsace. On m’y accueille encore chaleureusement.

Sur quel(s) projet(s) travailles-tu actuellement? A quand le prochain album de Lauter ?

J’ai récemment eu l’occasion de faire quelques musiques pour des courts-métrages et vidéos, ce qui me plaît beaucoup. Je continue à écrire. Là, encore, plusieurs directions sont prises puisque j’explore toujours différents styles de musiques. J’accumule doucement les chansons et guette le moment où s’en dégagera un répertoire homogène. J’aimerais beaucoup écrire en français, mais ce n’est pas chose facile…

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