Je me couche à l’ouest et je me lève à l’est. Ma trajectoire, contraire à celle du soleil, me mène vers des territoires nouveaux, loin de ma zone de confort moderne. Au petit matin, l’esprit embrumé, je me glisse sous les couvertures et, pendant que le monde continue de tourner, insensible au manège de la fourmilière humaine qui se trame sous mes fenêtres, je dors d’un sommeil profond. Je dors et je rêve qu’un autre monde est possible, différent de celui qu’on essaye de nous vendre à longueur de discours creux et de pages de réclame. Je rêve puis me réveille, tiré du lit par le martèlement des travaux, en face de chez moi. Le jour est déjà bien avancé et rien n’a changé. Toujours les mêmes scènes qui se rejouent, jour après jour, au même endroit, à la même heure. Encore un matin qui ne sert à rien. Je fais les cent pas dans mon salon, comme un animal en cage. Je m’énerve, je m’impatiente. J’attends la nuit qui ne vient pas. La nuit, elle, ne triche pas. Elle enveloppe de sa froide nudité les rues vides et silencieuses de la ville endormie.
L’avenir appartient à ceux qui se couchent tard. C’est la nuit que naissent les grandes idées. Ce sont les heures sombres qui mènent à la lumière. Alors j’ai marché vers l’est et, au bout du chemin, dans la clarté d’une aube nouvelle, j’ai aperçu le soleil. Je suis à l’ouest, déboussolé, et plus qu’un point cardinal, l’est devient un vaste espace à conquérir. Un espace de liberté. Une étendue sonore aussi dont s’emparent Christophe et Olivier, deux musiciens originaires de Lyon. East a vu le jour, il y a quelques années, de la rencontre de ces deux amateurs d’art et passionnés de musique. Très influencé par la cinéma, de la Nouvelle Vague aux films de Vincent Gallo ou Gregg Araki, le duo s’est construit une esthétique sombre et addictive, mêlant frimas cold wave et évidence mélodique. Leur premier EP Into the Dawn, sorti le 22 janvier dernier, distille des atmosphères complexes et mortifères sur lesquelles viennent se caler les textes sibyllins d’Olivier. C’est un enchaînement de scènes troubles et lancinantes. Une promenade hallucinée sous des cieux menaçants balayés d’un vent glacial et de fulgurances sonores. Un univers que le duo a déjà pu faire partager sur scène en première partie de groupes comme Holograms ou Psychic Ills ou à l’occasion des sélections Inrocks Lab pour le sud-est. La sortie de leur premier album, en fin d’année, devrait permettre à East de conquérir de nouveaux territoires. D’ici là, bonne écoute. Et si tu aimes ce que tu entends, achète le disque et va les soutenir en concert.
Prochaines dates :
– Le 28 juin : à Valence (Léz’Arts Café)
– Le 19 juillet : à Reims (L’Appart’K’fé)