Le groupe que les autres écouteront dans un an – Ep.92 : Bo Keeney

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Depuis que je suis père de famille, je me pose de nombreuses questions sur l’éducation des enfants. Dans quelle mesure ma progéniture sera-t-elle le produit de mes patients efforts d’aiguillage? Prenez, par exemple, l’éducation musicale. Mon fils a deux ans. Passez lui les Rolling Stones, Pink Floyd ou La Symphonie Fantastique. Rien ne se passe. Il geint, se traîne par terre, s’enquiert du menu du soir, construit des pyramides de Lego, fabrique des étoiles en pâte à modeler, exactement comme si sa mère faisait du bruit avec l’aspirateur… En un mot comme en cent, il se tamponne comme de l’an 40 des sons harmonieux qui émanent des enceintes de ma chaîne hi-fi dernier cri. Le pédiatre est pourtant formel. L’enfant n’est pas sourd. Se pourrait-il alors qu’il soit… est-ce qu’il n’est pas un peu… n’a-t-il pas un léger… enfin…vous voyez…Ne devrait-on pas envisager la possibilité qu’il soit…attardé? Il est en parfaite santé et tout à fait avancé pour son âge, Monsieur, n’ayez aucune crainte. A 40€ la consultation, j’espère que ce sympathique professionnel de santé ne se paie pas ma tête. Facile à dire, ce n’est pas lui qui s’est tapé 28 fois en 3 jours la chanson la plus inepte de toues les temps émaillée de manifestations d’enthousiasme enfantin. Tapez Poussin Piou sur Youtube et vous comprendrez mon calvaire. Seule lueur d’espoir dans cet horizon obscur, le parcours de Bo Keeney et sa musique qui vous masse les tympans. Prénommé Bo en hommage à Bo Diddley et fils d’une chanteuse-guitariste de punk et de hard rock, la voie du petit Keeney vers les sommets du rock’n’roll semblait toute tracée. Mais les enfants sont capricieux. Le jeune homme veut jouer de la basse comme Flea, être aussi éclectique que Beck et devenir un groupe à lui tout seul comme Stevie Wonder.

A 23 ans, il joue du piano, de la batterie, de la basse, de la guitare et de l’harmonica. A 16 ans déjà, il participe à une compétition de la British Academy of Songwriters and Composers, qu’il remporte en présentant non pas une chanson, mais un album complet écrit et produit par ses propres soins. Quelques années plus tard, il investit un container dans une zone industrielle de Winchester pour y installer son studio. Il y passe une année entière, dormant peu, jouant et bidouillant à longueur de journées. Le résultat est à la hauteur de l’investissement. Le premier EP de Bo Keeney, Don’t You Worry, reflète bien l’éclectisme et le fourmillement d’idées qui traversent la tête du garçon. Sur le morceau-titre, on croit d’abord avoir affaire à un crooner à la voix de velours puis, sur le second couplet, la chanson prend une nouvelle direction, tirant davantage sur le drum’n’bass. C’est ça le style Bo Keeney. Une faculté incroyable à mélanger des éléments apparemment inconciliables pour en faire un univers cohérent. Les deux autres titres, Motivation et Ambulance, confirment cette étonnante capacité à allier soul et rythmiques électroniques. Vous aurez envie de faire l’amour, de chanter, de danser et de refaire l’amour. La voix est sensuelle à souhait, le groove est irrésistible et le mélange des genres vous fera tourner la tête comme un grand cru qui combine harmonieusement des cépages différents. C’est le fruit d’une culture musicale large et bien assimilée. C’est aussi la manifestation d’un talent immense et prometteur. Il est tout à fait possible que Bo Keeney devienne bientôt une vedette planétaire. Je vous aurai prévenus…

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