En toutes saisons, au hasard des rues strasbourgeoises, on croise la silhouette de l’homme au chapeau. Est-il fou ? Chapelier ? Je le regarde à la dérobade et je me perds en conjectures. Que cache-t-il sous les bords de son chapeau ? Des souvenirs qui ne doivent pas lui échapper ? Des histoires sans fin ? Des mélodies à en perdre la tête ?

Le personnage a quelque chose d’intrigant. Il ne colle pas au décor. On le croirait venu d’un autre lieu, d’une autre époque. Il erre sur les bords de l’Ill, les yeux perdus dans le vague. Peut-être voit-il des choses que les autres ne voient pas. Peut-être entend-il des voix qui ne parlent qu’à lui.  

Il y a peu de chances que l’homme au chapeau travaille pour le micro-label lyonnais Without My Hat Records. Pourtant, avec ou sans chapeau, tous deux partagent le charme d’un anachronisme discret. Prenez le dernier disque paru chez Without My Hat : Cocktails, par le quatuor parisien Gulcher. Ne ressentez-vous pas une pointe de nostalgie, à l’écoute de ces mélodies ? Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître… un temps où la pop ou le rock n’avaient pas besoin de s’électroïser pour exister, un temps où les guitares avaient encore la part belle. Fin des années 80, début des années 90.

Oui, Gulcher cultive un côté vintage. Oui, Gulcher se fiche complètement d’être dans l’air du temps. Et oui, c’est sans importance parce que, si une bonne chanson, c’est avant tout une bonne mélodie, alors ces quatre-là ont tout compris. Avec, dans ses placards, tout ce que la pop d’outre-Manche a sorti de grand, Gulcher élabore des cocktails vitaminés aux saveurs intemporelles. A consommer sans modération…