J’ai interviewé : Cold Pumas

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Avec Persistent Malaise, les Cold Pumas ont sorti l’un des albums les plus fascinants de ce début d’année. Un disque à l’atmosphère étouffante qui, une fois entré dans votre esprit, revient inlassablement vous hanter. Pour en savoir plus, j’ai posé quelques questions à Patrick Fisher, le leader du groupe. Une interview sans langue de bois où on apprend beaucoup sur le fonctionnement d’un groupe de rock…

Quels sont tes premiers souvenirs musicaux ?

Comme les vacances en France avec mes parents, dans ma jeunesse, sont devenues pour moi un guide incroyablement fort et sacré en termes de perception sensorielle, je choisirais inévitablement des exemples tirés d’une décennie de vacances au camping. En premier lieu, je me souviens que j’écoutais The Eagles, Paul Young et Jean-Michel Jarre (et la fascination morbide qu’exerçait sur moi le crâne humain sur la pochette de la cassette de l’album Oxygène de Jean-Michel Jarre et le crâne d’aigle sur la pochette de leur Greatest Hits) pendant qu’on roulait en Combi Volkswagen dans les Pyrénées. Quelques années plus tard, j’ai écouté pour la première fois le Crooked Rain, Crooked Rain de Pavement dans une tente le jour de mon anniversaire sur un  terrain de camping, je ne sais plus où et bien que, au départ, j’ai été rebuté par quelques accordages obtus, c’était la chose la plus proche d’une épiphanie musicale que j’aie jamais eue dans mon adolescence.

Comment avez-vous commencé à jouer ensemble ?
Nous nous sommes rencontrés à Exeter dans le sud-ouest de l’Angleterre, car mon frère Oliver et moi avons passé la majeure partie de notre jeunesse là-bas, et Dan y faisait ses études et, plus tard, est devenu Dan Tyler du groupe Tyler, qui était un “vrai” groupe et donc quelque chose, en théorie, d’énigmatique et de désirable. Notre présence timide aux concerts à The Cavern nous a permis de rencontrer Dan, ce qui a été le point de départ de la majorité des amitiés importantes que j’ai construites à cette période. Nous avons fini par aller en salle de répétition, là où nos groupes respectifs s’exerçaient un soir de Nouvel An de débauche et d’idéalisme éphémère, il y a tellement longtemps que ça me causerait une crise existentielle de le calculer. Oh Hell No, le fougueux et disco-funk prédécesseur de Cold Pumas est né avec notre ami Gentle Ben à la batterie. Ensuite, nous avons fait quelques concerts fondateurs dans l’arrière-boutique d’une librairie appartenant à John qui aimait Can, et donc comme on les pillait sans intention,  on est devenus comme la prunelle de ses yeux (ou quelque chose de moins nauséeux). Il y aura toujours une immense reconnaissance collective pour son enthousiasme. Quand nous avons tous les trois bougé à Brighton, après une horrible discussion pour choisir notre nouveau nom, Cold Pumas est né.

D’où vient le nom Cold Pumas ? 
Malheureusement, c’est un nom que nous avons choisi par nécessité et ça vient de’une longue liste insensée de mots composés qui, à un moment en 2008, sonnaient marginalement mieux que les autres. C’est comme ça. Le show doit continuer (même avec ça sur les affiches).

Vous jouez ensemble de puis 2008. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de sortir un album ?
La raison ultime, c’est peut-être que nous n’étions pas suffisamment satisfaits de la musique que nous avions créée auparavant pour nous lancer dans quelque chose de plus complet. Je suis certain qu’à l’avenir, j’apprécierai quelque chose comme Jela pour ce qu’il est et je suis très fier de plusieurs des titres qui figurent sur la sélection de 45 et de 33 tours que nous avons sortie depuis le début de cette aventure. Pourtant, ils me semblent tellement déconnectés, à tel point que j’ai l’impression maintenant que c’est le travail d’un autre groupe. Assurément, cette période a été aussi importante pour parfaire notre son que pour décider ce que nous ne voulions pas faire, mais, pour le coup, j’étais très véhément sur le fait de travailler à quelque chose de plus standard en termes de structure et de moins frénétique juste pour être frénétique – quelque chose que j’aimerais écouter sans objectivité à la maison. Je savais que ça ne marcherait jamais comme une chanson pop traditionnelle parce que ce n’était tout simplement pas possible, mais ce qui m’intéressait, c’était le conflit avec cette idée.

Est-ce que Persistent Malaise est un disque que tu devais faire comme une thérapie pour te remettre d’une relation difficile ?
Tu veux dire me coltiner mon frère dans le groupe depuis si longtemps?! Oui, bien sûr. Plus sérieusement, comme la majorité des textes ont été écrits après avoir terminé les morceaux, souvent dangereusement près du moment de l’enregistrement, je racontais n’importe quoi quand on jouait en live, ce qui aurait été plus dur si nous utilisions moins la reverb. En ce sens, ce sera toujours la musique qui viendra avant les mots. Mais j’ai quand même ressenti avec certitude qu’avoir des paroles écrites avec une approche plus consciencieuse est quelque chose de très important et qui faisait partie aussi de notre développement musical, même si je ne peux pas vraiment dire que mon état d’esprit personnel se rapprochait nécessairement de la façon dont tout le monde écrit des chansons. Pourtant, je crois que je voulais vraiment faire quelque chose qui soit plus triste, moins futile, plus profond, donc peut-être qu’il y a une vérité inconsciente là-dedans.

Est-ce que tu avais une idée préconçue de la façon dont l’album devrait sonner ou as-tu laissé tes sentiments te guider vers ce son “motorique” ?

Absolument pas. Notre approche, c’était d’abord de faire quelque chose de moins frénétique, moins abstrait, moins complexe juste pour être complexe. C’est avec ça que nous avons commencé : beaucoup de non et de peut-être. Au moment où les deux premiers albums de Women sont sortis, nous avons joué quelques fois avec eux et nous avons appris à les connaître et il y avait vraiment quelque chose dans la façon dont ils appréhendaient les choses qui avaient une profondeur et une subtilité musicale qui nous faisait peut-être défaut à la fin de cette période, car ils semblaient incroyablement frais et sans compromissions. Je crois que nous avons perfectionné quelques uns de nos innombrables plagiats de Sonic Youth en un truc plus acceptable et nous avons conyinué sur cette voie. Pour l’essentiel, l’élément “motorique” est une réminiscence de cette idée de persistence et de répétition avec laquelle nous avons commencé, mais déshabillée rythmiquement. C’est curieux de voir comme l’étiquette kraut est lentement revenue à la mode ces derniers mois, car l’essence motorique de notre son vient toujours de ces jours naïfs et enivrants à la librairie.

L’album a été écrit dans des circonstances particulières. Est-ce que ça signifie que vos prochains disques auront un son totalement différent ?
Si tu fais de nouveau référence au thème, je ne crois pas que ce soit nécessairement un facteur. Je pense que le fait que j’aie (et bientôt Oliver) déménagé à Londres au cours des 6 derniers mois et que Dan soit resté à Brighton aura beaucoup plus d’influence et peut-être que nous nous retrouverons de nouveau à nous battre avec une redoutable page vide. Je crois qu’il y aura moins de suffisance, eu égard au nombre de répétitions gâchées dans le passé par des discussions secondaires. C’est un luxe que nous ne pourrons simplement plus nous permettre. Honnêtement je ne me suis pas encore demandé à quoi ressemblera le prochain album dans son ensemble, car c’est une façon de penser très intimidante et contre-productive pour des gens comme nous. Je suis très content de rester dans le flou pour le moment.   

Quelles sont les prochaines étapes pour vous ?
Hormis cette odyssée d’écrire de nouvelles choses et, ensuite, de les sortir, ce qui est évidemment la principale raison d’être d’un groupe, nous n’avons jamais été aussi près de faire un tour du monde des Cold Pumas (qu’importe si ça se limite à un seul continent pour l’instant). En France, on joue à Metz, Lyon et un festival dans le sud du pays pas encore annoncé et d’autres dates encore en cours de finalisation. Bref, désolé de finir sur une pure note d’autopromotion mais bon…  




Et en VO :

What are the next steps for Cold Pumas in 2013 ?
Apart from the above odyssey of writing new things and then releasing them, which is evidently the primary point of existing as a band, we’ve got closer to doing the Cold Pumas World Tour than ever before (never mind that it is limited to just one continent so far). In France we’re playing Metz, Lyon and a yet to be announced festival in the Southernmost reaches of the country, plus more to be announced (offered). Anyway, sorry to end on a note of sheer DIY self-promotion, but needs must…

What are your first musical memories ?
In that holidaying with my parents throughout France in my formative years has become a unrealistically weighted and hallowed beacon of sensory perception for me, I would inevitably pick examples from a decade’s worth of camping holidays. Firstly, listening to The Eagles, Paul Young and Jean Michel Jarre (and being morbidly fascinated by the human skull on the cassette covers of Jarre’s Oxygene and the eagle skull on The Eagles’ Their Greatest Hits), whilst driving around in the VW Camper in the Pyrenees. Some years later I listened to Pavement’s Crooked Rain Crooked Rain for the first time in a tent on my birthday in a campsite somewhere I forget, and though I was repelled initially in a sense by some of the obtuse tunings, (such beige ears), it was as close to a kind of musical epiphany I would ever get to in my adolescence.

How did you guys start playing together ?
We met in Exeter in the South West of England, as brother Oliver and I grew up there predominantly, and Dan went to university and being older was Dan Tyler of the band Tyler, who were a “real” band (5 Ks!) and thus theoretically enigmatic and desirable! Eventually meeting Dan through our timid presence at shows at The Cavern, which was the fulcrum for the majority of important friendships I made in that period, we ended up going to the practice room where our separate bands rehearsed on some debauched but transiently idealistic New Years Eve that is probably now so many years ago that it will cause an existential crisis if I calculate it. Oh Hell No, the disco/funk-accomodating, off-the-leash predecessor to Cold Pumas, was born with our friend Gentle Ben on drums. We then played some seminal shows in the basement of a bookshop owned by John who loved Can, and therefore us, ripping them off without intention, were the apple of his eye (or something less queasy). There will always be a tremendous collective warmth for his enthusiasm. When all three of us relocated to Brighton, one awful band christening discussion later, Cold Pumas was born. 

Where does the name Cold Pumas come from ?
See above! It was unfortunately something we picked as a necessity and thus comes from a long meaningless list of compounded words, that at some point in 2008, sounded marginally better than the other ones. Yet it is what it is. The show must go on etc (even with that on the poster)

You’ve been playing together since 2008. Why did you wait so long before releasing a LP ?
Ultimately perhaps we weren’t happy enough with the music we had previously created to begin to mould into something more complete. I’m certain that in the future I will appreciate something like Jela for what it is, and many of the songs on the selection of 7” and 12” we released from the point of our incarnation I am very proud of, yet they feel so detached to the degree that they sound somewhat like another band to me now. Certainly that earlier period, in regards to honing a “sound” was important as much as it was working out what we didn’t want to do, but I for one was certainly vehement about wanting to work on something that had more of a standardised structure, and was less frenetic for the sake of being frenetic – I suppose ultimately something I would wanted to listen to without objectivity at home. I knew it was never going to work out like a traditional pop-song, simply because it couldn’t, but I was interested in the conflict between that idea.

Was Persistent Malaise a record you had to do as a therapy to recover from a difficult relationship?
You mean being in a band with Brother Bother for so long?! Why of course! In all seriousness, with writing the majority of the lyrics occurring after the song is complete, often dangerously close to when we eventually record, for many months I’ll just be spouting nonsense when we play it live, which is getting harder to do using less ridiculous amounts of reverb. In that sense, it will always be the music which comes prior to whichever words are put on top of that. I certainly felt that having lyrics that were written with a more conscientious approach was a very important thing as part of how we may have developed musically, but I can’t really say that my own state of mind was necessarily relative to how everyone approached writing the songs. Yet I suppose I did want to do something sadder, less throwaway, with more depth, so perhaps there is a subconscious truth there.
Did you have preconceived idea of what the album would sound like or did your feelings lead you to such a “motorik” sound ?
Definitely not. In regards to the approach of something less frenetic, less abstract, less complex for complexity’s sake, that was all we began with: a lot of “nos” and perhaps at the point when Women’s first two albums came out, we played with them a few times and got to know them and there was definitely something in the way that they approached things that had musical depth and subtlety that was perhaps lacking in the tail end of that period, for they sounded incredibly fresh and uncompromising. I think then we moulded some of our innumerable Sonic Youth pastiche jams into something more palatable and continued that. Essentially the motorik element is a retention of that idea of relentlessness and repetition that we began with, but just rhythmically stripped down. It’s curious to me how the kraut influence has slowly become a fashionable label to use on things in recent months over here, as our motorik-ness still derives from those naive and heady days in the bookshop in essence. 

The album was written under very special circumstances. Does it mean that your next releases will sound totally different ?
In regards to circumstance, if you’re again referring to the theme, I don’t think that will necessarily be a factor. I think that the fact that I (and soon Oliver) have moved to London in the past six months and Dan has remained in Brighton, will shape things more, and perhaps having the formidable empty page again to contend with. I think there will be less complacency in regards to how many weekly practices were wasted by petty arguments in the past, in that we simply won’t be able to have that “luxury”. I honestly haven’t thought about what a next album will sound like as a whole, as that’s a very daunting and counterproductive way of thinking for people like us! I’m certainly happy to remain in the dark for the moment.

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