Ambiance de western. Le ciel, indécis, fait office de plafond. Immobiles, ils s’épient. A ma gauche, culotte courte, bas relevés sur la rotule, œil sombre, muscles saillants, QI proche du néant : l’arrière gauche du France Football Club. A ma droite, boudiné dans son costume sur-mesure, bouffi d’orgueil et de suffisance, IMC proche de l’infini : le consultant sportif.
Je vois d’ici l’adaptation au cinéma. Pascal Légitimus. Gérard Depardieu. Il faut se l’imaginer, notre Gégé, imbibé de vodka, s’attaquant à la scène des jongles. Max Pécas n’aurait pas rêvé mieux. Voilà ce qui arrive quand on prend des idiots au sérieux.
Et dire qu’on est plusieurs millions à se demander si une bande d’imbéciles heureux en short passera l’été 2014 au Brésil. Personnellement, je suggère qu’on les lâche au milieu de la forêt amazonienne et qu’on n’en parle plus une bonne fois pour toutes.
Il y a quand même mieux à faire au Brésil que de s’intéresser à ces fâcheux ou à ceux qui vivent à leurs crochets en crachant dans la soupe. On pourrait – je ne sais pas, moi – se laisser emporter par les déhanchés obsédants d’une danseuse de samba, se la couler douce à Copacabana ou succomber aux charmes de A Fase Rosa.
Originaires de Belo Horizonte, les membres de A Fase Rosa développe une musique hybride, à mi-chemin entre culture populaire et pop alternative. Un entre-deux fascinant, forcément dépaysant pour l’auditeur européen, puisqu’on y retrouve des éléments de samba, de bossa, mélangés avec des inspirations plus contemporaines.
Pour bien comprendre leur album Homens Lentos, il faut se replacer dans le contexte. Belo Horizonte est une agglomération immense et cosmopolite, qui offre une large mosaïque culturelle au cœur de laquelle A Fase Rosa puise son inspiration. Influencé également par les travaux du géographe Milton Santos, pour qui les hommes lents (Homens lentos) sont ceux qui, en raison de leur exclusion sociale, ne peuvent pas suivre la vitesse du monde contemporain, le disque reprend à son compte cette idée d’adopter son propre rythme, entre tradition et modernité, en réponse au monde environnant.
Vu d’ici, on résume trop volontiers le Brésil à ses traditions, qui tiennent en quelques images d’Épinal. A Fase Rosa nous renvoie l’image d’une culture complexe, agrégat de différentes strates qui viennent nourrir leur musique. C’est dans cette confrontation de nos images préconçues et de la réalité du pays que Homens Lentos vient nous toucher. Une découverte dépaysante qui suffira à nous consoler si nos gugusses en culotte courte devaient rester à quai…
